Texte de l’initiative
Art. 104c Souveraineté alimentaire
2 Elle veille à ce que l’approvisionnement en denrées alimentaires indigènes et en aliments indigènes pour animaux soit prépondérant et que leur production ménage les ressources naturelles.
3 Elle prend des mesures efficaces pour:
a. favoriser l’augmentation du nombre d’actifs dans l’agriculture et la diversité des structures;
b. préserver les surfaces cultivables, notamment les surfaces d’assolement, tant en quantité qu’en qualité;
c. garantir le droit à l’utilisation, à la multiplication, à l’échange et à la commercialisation des semences par les paysans.
4 Elle proscrit l’emploi dans l’agriculture des organismes génétiquement modifiés ainsi que des plantes et des animaux issus des nouvelles technologies de modification ou de recombinaison non naturelle du génome.
5 Elle assume notamment les tâches suivantes:
a. elle soutient la création d’organisations paysannes qui visent à assurer l’adéquation entre l’offre des paysans et les besoins de la population;
b. elle garantit la transparence sur le marché et favorise la détermination de prix équitables dans chaque filière;
c. elle renforce les échanges commerciaux directs entre paysans et consommateurs ainsi que les structures de transformation, de stockage et de commercialisation régionales
7 Pour maintenir et développer la production indigène, elle prélève des droits de douane sur les produits agricoles et les denrées alimentaires importés et en régule les volumes d’importation.
8 Pour favoriser une production conforme aux normes sociales et environnementales suisses, elle prélève des droits de douane sur les produits agricoles et les denrées alimentaires importés non conformes à ces normes et peut en interdire l’importation.
9 Elle n’accorde aucune subvention à l’exportation de produits agricoles et de denrées alimentaires.
10 Elle garantit l’information et la sensibilisation sur les conditions de production et de transformation des denrées alimentaires indigènes et importées. Elle peut fixer des normes de qualité indépendamment des normes internationales.
Art. 197, ch. 12
12. Disposition transitoire ad art. 104c (Souveraineté alimentaire)
Le Conseil fédéral soumet les dispositions légales nécessaires à l’exécution de l’art. 104c à l’Assemblée fédérale au plus tard deux ans après l’acceptation de cet article par le peuple et les cantons.
Le texte en détails
1. Afin de mettre en œuvre la souveraineté alimentaire, la Confédération favorise une agriculture paysanne indigène rémunératrice et diversifiée, fournissant des denrées alimentaires saines et répondant aux attentes sociales et écologiques de la population.
L’agriculture paysanne démontre d’un ancrage fort au terroir. Elle vit pour et par son environnement socio-économique immédiat. Elle pratique une agriculture qui soit durable et qui soit ainsi transmissible aux générations futures.
Rémunératrice : l’initiative souhaite placer les êtres humains au cœur du système. Elle souhaite corriger une lacune qui fait qu’actuellement, ce secteur ne permet pas aux personnes actives de vivre correctement.
Diversifiée : l’initiative entend par là un secteur qui offre une place à toutes les formes d’exploitations. Que ce soit en terme de taille ou en terme de statut juridique. Actuellement, les petites exploitations, même si elles sont durables, sont souvent discriminées par des mesures législatives. Quant aux nouvelles formes de collaborations et d’installation elles sont souvent non reconnues (installation collective etc.).
Attentes sociales et écologiques : si la souveraineté alimentaire est un concept développé sur le plan international, il s’articule au niveau local en fonction des réalités socio-économiques. En Suisse, la population peut avoir des attentes différentes que la population Grecque, Argentine, Malienne ou Indonésienne. Il faut en tenir compte. Ces attentes peuvent être identifiées en développement un processus de dialogue permanant au plan local, cantonal et national sur les questions agricoles et alimentaires.
2. Elle veille à ce que l'approvisionnement en denrées alimentaires indigènes et en aliments indigènes pour animaux soit prépondérant et que leur production ménage les ressources naturelles.
Prépondérant : notre taux d’auto approvisionnement s’érode d’année en année, notamment si nous prenons en compte le taux d’auto approvisionnement net (y compris les aliments pour animaux dont les importations ne cessent de croitre). Sans vouloir fixer un chiffre exact, l’initiative estime que cet approvisionnement indigène doit être au delà de 50%.
Aliments pour animaux : la Suisse dépend de plus en plus de l’extérieur pour alimenter son bétail. C’est un non-sens écologique et éthique. Ces productions de protéines végétales comme le soja, la luzerne etc. ou énergétiques comme le maïs sont produites à large échelle dans des pays tels que le Brésil, l’Argentine ou bientôt la Roumanie. Elles se font au détriment d’une agriculture paysanne dans ces pays.
Ressources naturelles : si l’initiative souhaite une production optimale sur le plan indigène, elle souhaite que les ressources naturelles soient prises en compte. En effet, il s’agit de produire de manière durable, en n’épuisant pas les sols, en ne provoquant pas des pollutions liées à des modes de production inadéquats. Il s’agit ainsi de produire les produits souhaités en fonction de nos conditions géo-climatiques en Suisse ; il faut donc choisir les cultures appropriées à notre environnement.
3. Elle prend des mesures efficaces pour :
a. favoriser l’augmentation du nombre d’actifs dans l’agriculture et la diversité des structures;
Nombre d’actifs : l’initiative part du constat que pour remplir les différentes tâches confiées à l’agriculture, une augmentation du nombre d’actifs est indispensable. Elle est possible uniquement par une rémunération plus équitable des premiers maillons de la chaine, par une meilleure allocation de la valeur ajoutée à ce niveau (voir plus loin). L’augmentation du nombre d’actifs peut signifier plus de personnes travaillant sur les fermes existantes comme la création de nouvelles structures agricoles là où c’est opportun.
Diversité des structures : il s’agit d’une diversité dans la taille comme dans le statut juridique.
b. préserver les surfaces cultivables, notamment les surfaces d’assolement, tant en qualité qu'en quantité;
Surfaces cultivables : elles incluent les surfaces agricoles utiles et les estivages. La surface globale diminue sous la pression de la construction d’habitats et d’infrastructures et sous la pression de la forêt.
Surfaces d’assolement : chaque canton possède un quota de surfaces dites « d’assolement » en dessous duquel il ne doit pas descendre. Or, actuellement, deux problèmes sont identifiés : certains cantons l’ont déjà atteint et de plus certains tendent à replacer les surfaces d’assolement dans des zones où les sols ne sont pas les meilleurs pour la production agricole. Il s’agit pour l’administration territoriale de défendre ces surfaces et de garantir qu’elles soient placées au bon endroit et que les sols ne soient pas dégradés.
c. garantir le droit à l’utilisation, à la multiplication, à l’échange et à la commercialisation des semences par les paysans.
4. Elle proscrit l'emploi dans l'agriculture des organismes génétiquement modifiés ainsi que des plantes et des animaux issus des nouvelles technologies de modification ou de recombinaison non naturelle du génome.
5. Elle assume notamment les tâches suivantes:
a. elle soutient la création d’organisations paysannes qui visent à assurer l’adéquation entre l’offre des paysans et les besoins de la population.
b. elle garantit la transparence sur le marché et favorise la détermination de prix équitables dans chaque filière.
Transparence : l’initiative souhaite que la Confédération garantisse une meilleure transparence sur le marché. Celle-ci n’est de loin pas atteinte aujourd’hui en raison de multiples facteurs : concentration du marché dans la main de quelques acteurs qui sont représentés à plusieurs niveau de la chaine alimentaire, manque de contrats clairs, etc.
Prix équitables par filières : l’initiative qui annonce dans son préambule vouloir une agriculture rémunératrice propose ici que la Confédération favorise la détermination de prix. Il ne s’agit pas d’un prix unique, mais bien de favoriser par filière, un dialogue constructif et équitable permettant de déterminer un/des prix qui permettent de rémunérer correctement les personnes actives. Ainsi, il est possible d’avoir un prix différencié en fonction du mode de commercialisation (vente directe, semi directe, en gros, …), du mode de production (conventionnel, bio, PI) ou bien évidemment du produit (lait, fromage, viande, charcuterie etc.). Clairement, l’initiative part du constat que le désengagement graduel de l’Etat dans les marchés agricoles n’a apporté aucune amélioration. Il a été synonyme de déstructuration du secteur, de basculement du pouvoir de décision de la ferme aux conseils d’administration des grands acheteurs. Ainsi, par un tel alinéa, l’initiative souhaite que la Confédération, sans fixer elle-même les prix, mette tout en œuvre pour favoriser l’émergence de prix qui reflètent bien les réalités des coûts de production.
c. elle renforce les échanges commerciaux directs entre paysans et consommateurs ainsi que les structures de transformation, de stockage et de commercialisation régionales.
6. Elle porte une attention particulière aux conditions de travail des salariés agricoles et veille à ce qu'elles soient harmonisées au niveau fédéral.
Harmonisation : En Suisse, il existe 26 contrats types de travail, un par canton. Certains ont un salaire minimum qui est indiqué, d’autres se réfèrent aux recommandations de l’Union Suisse des Paysans. Les heures de travail hebdomadaires varient de 45 à 66 heures. Ceci pour un même marché indigène. Cela a deux conséquences négatives qu’il faut corriger. Il n’est pas possible d’avoir une telle « concurrence » en terme de coûts de production d’un bout à l’autre de la Suisse. Deuxièmement, il n’est pas admissible que des conditions de travail de ce type perdurent en Suisse. Ainsi, l’initiative souhaite dans cet alinéa 5, comme dans le 4, améliorer les conditions socio-économiques de premiers maillons de la chaine. Conditions qui sont intrinsèquement liées.
7. Pour maintenir et développer l'agriculture indigène, elle prélève des droits de douane sur les produits agricoles et les denrées alimentaires importées et en régule les volumes d’importation.
8. Pour favoriser une production conformes aux normes sociales et environnementales suisses, elle prélève des droits de douane sur les produits agricoles ou les denrées alimentaires importés non conforme à ces normes et peut en interdire l'importation.
9. Elle n'accorde aucune subventions à l’exportation de produits agricoles et de denrées alimentaires.
10. Elle garantit l’information et la sensibilisation sur les conditions de production et de transformation des denrées alimentaires indigènes et importées. Elle peut fixer des normes de qualité indépendamment des normes internationales.
Information et sensibilisation : l’initiative estime qu’au delà des campagnes promotionnelles pour les produits locaux, il y a lieu d’aller au delà avec une vraie formation populaire sur les questions agricoles et alimentaires. Cette formation doit être transversale à la société et aux différents départements qui peuvent être concernés par ces questions. Il est souhaitable qu’un dialogue permanent soit instauré sur le plan communal, cantonal et fédéral. Au niveau fédéral, une commission pourrait par exemple être instaurée avec des représentants des différents maillons, de l’ouvrier agricole au consommateur, en passant par les intermédiaires, les aménagistes etc.
Les éventuels accords signés avec des pays tiers, qu’ils soient bilatéraux ou multilatéraux ne doivent pas restreindre notre souveraineté à définir nos normes de qualité. Ces accords ne doivent pas être brandis pour empêcher des cercles intéressés de consommateurs, citoyen-ne-s ou autres à réclamer plus de transparence sur les normes.
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